Dans une circulaire du 16 octobre 2012, le Ministre de l’Intérieur a décidé d’assouplir la condition d’insertion professionnelle exigée pour la naturalisation en invitant les préfets à une prise en compte globale du parcours professionnel.
Rappelons qu’au titre de l’article 21-24 du code civil « nul ne peut être naturalisé s’il ne justifie de son assimilation à la communauté française » et qu’au titre de l’article 21-16 du même code « nul ne peut être naturalisé s’il n’a sa résidence en France ». La condition d’assimilation à la communauté française édictée par la première disposition implique notamment que le demandeur soit inséré professionnellement en France et la condition de résidence résultant de la seconde disposition implique notamment qu’il tire ses revenus d’une activité professionnelle en France.
En l’absence d’une circulaire fixant des critères clairs et objectifs, l’administration a appliqué ces conditions de manière particulièrement stricte en exigeant le plus souvent que le demandeur soit en possession d’un contrat de travail à durée indéterminée, hors période d’essai, à temps plein et perçoive des revenus suffisants, c’est-à-dire supérieur au SMIC. De même, elle la conduisait à déclarer automatiquement irrecevables les demandes de naturalisation des titulaires d’une carte de séjour « étudiant ». Ainsi, les préfectures considéraient que l’insertion professionnelle était insuffisante et qu’elle ne permettait pas au demandeur de pourvoir durablement à ses besoins et ajournaient ou déclaraient irrecevable la demande de naturalisation.
La circulaire du 16 octobre dernier a entendu inviter les préfets à assouplir une telle application et fixe des éléments d’appréciation des demandes sur ce point.
1) La nature du contrat de travail ne doit plus être un obstacle
Tout d’abord, la nature du contrat de travail (contrat à durée déterminée, intérim, …) ne doit pas être, nous dit la circulaire, un obstacle à la demande de naturalisation dès lors que l’activité exercée permet d’avoir des ressources stables et suffisantes.
Néanmoins, on peut en encore s’interroger sur l’appréciation de la stabilité des ressources d’un étranger en contrat de travail à durée déterminée ou sous contrat d’intérim. Probablement, la stabilité sera appréciée sur l’existence d’une stabilité de fait de l’activité professionnelle des années précédant la demande de naturalisation.
Par ailleurs, la circulaire précise que les Assistants Temporaires d’Enseignement et de Recherche (ATER) qui disposent d’un contrat de travail à durée déterminée ne doivent pas voir leur demande rejetée au seul motif de la précarité de leur situation.
Celle-ci doit être appréciée au regard de la stabilité de leur installation en France, de leurs revenus, de leur spécialité et de la qualité de leur candidature au vu des travaux, publications et lettres de recommandation.
2) Le statut d’étudiant ne doit plus être un obstacle
S’agissant des étrangers titulaires d’une carte de séjour « étudiant », le ministre précise que leur demande ne doit pas être refusée à raison de la seule possession de ce titre mais indique que leur insertion professionnelle doit être avérée. Cette indication est pour le moins déroutante. En effet, il est difficile à un étudiant étranger de justifier d’une insertion professionnelle compte tenu de son statut étant précisé qu’il n’est autorisé à travailler que dans la limite d’un contingent annuel de 964 heures correspondant à 60% d’un temps plein.
Concernant les élèves des grandes écoles françaises et des doctorants, le ministre invite les préfet à examiner avec discernement leur situation sans opposer systématiquement la précarité de leur situation et, en particulier, la nature de leur carte de séjour. Là encore, les critères demeurent flous mais il semble que l’on s’oriente vers un assouplissement.
3) La présomption d’assimilation pour certains jeunes étrangers
La circulaire du 16 septembre 2012 apporte une nouveauté assez originale dans l’appréciation du critère de l’assimilation à la communauté française.
Elle prévoit en effet que les jeunes âgés de moins de 25 ans, présents en France depuis au moins 10 ans et ayant suivi une scolarité continue d’au moins 5 ans bénéficient d’une présomption d’assimilation.
4) L’absence d’autorisation d’exercice de la médecine n’est plus un obstacle à la naturalisation
Rappelons que les médecins étrangers titulaires d’un diplôme en médecine obtenu dans un pays tiers à l’Union européenne sont tenus d’obtenir une autorisation d’exercice de la médecine en France selon la procédure prévue par la loi n°95-116 du 4 février 1995 modifiée.
Dans l’appréciation des demandes de naturalisation, la jurisprudence considérait que les médecins étrangers qui n’avaient pas obtenu une telle autorisation ne pouvait justifier d’une insertion professionnelle et leur demande de naturalisation était rejetée (voir, par exemple, Cour administrative d’appel de Nantes, 29 juillet 2008, n°08NT00419, à propos d’un ressortissant syrien).
Désormais, la circulaire estime que l’absence d’autorisation d’exercice de la médecine n’est plus un obstacle à la demande de naturalisation qui doit être examinée dans les conditions du droit commun (maîtrise de la langue française, adhésion aux valeurs et principes de la République française, autonomie suffisante).